Discours de bienvenue - Dr. Theodor Herzl
« Pour autant qu’on puisse en juger actuellement, ces trois jours donneront un aperçu de l’état actuel de la question juive. Une grande quantité de documents a été partagée entre nos rapporteurs. Vous savez tous, ne serait-ce que d’une manière vague, que cette situation n’est pas encourageante, à quelques exceptions près. C’est d’ailleurs la raison de notre présence à Bâle aujourd’hui. Les intervenants feront l’analyse de la situation des Juifs dans les différents pays qui leur sont rattachés. Notre communauté de destin a vécu une longue éclipse, même si les fragments dispersés du peuple juif ont connu, pour ainsi dire partout ou presque, un sort analogue. Ce n’est qu’à notre époque que les nouveaux miracles du transport ont permis de rétablir contact et communication entre ceux qui étaient séparés. Et en ce temps par ailleurs si sublime, nous nous sentons partout cernés par une vieille haine. L’antisémitisme en est le nom moderne et trop connu. La première impression des Juifs contemporains a été la surprise, à laquelle ont succédé la douleur et la colère.Nos adversaires ne réalisent peut-être pas à quel point, touchant nos âmes mêmes, ils ont blessé ceux d’entre nous qu’ils ne cherchaient probablement pas à blesser. La communauté juive moderne, cultivée, sortie du ghetto, désaccoutumée du marchandage, a été atteinte en plein cœur.
Assumons cela pleinement, sans nous rendre coupables ni vouloir toucher et faire larmoyer nos adversaires. Nous sommes honnêtes envers nous-mêmes.
Pendant des siècles, les étrangers ont été mal informés sur nous. Le sentiment de solidarité de groupe, auquel on nous a si souvent et si violemment reproché, était en voie de dissolution complète lorsque nous avons été attaqués par l’antisémitisme. Ce dernier nous a fait reprendre des forces. Nous sommes, pour ainsi dire, « rentrés à la maison ».
Le sionisme signifie le retour au cœur de l’identité juive avant le retour au pays des Juifs. Nous, les fils qui sommes revenus, trouvons beaucoup de choses dans la maison ancestrale qui appellent à l’amélioration; en particulier, nous avons des frères plongés dans la misère. Pourtant, nous avons été accueillis dans l’ancienne maison parce que, comme chacun le sait, nous ne présumons pas le droit de renverser les institutions. Cela deviendra évident avec le développement du programme sioniste. »